Une histoire millénaire
Depuis la plus haute Antiquité
Les premières cloches remontent à l’âge du Bronze. Il en existe en Chine depuis 6 000 ans. Tous les peuples de l’Antiquité en fabriquaient.
Dans les Hautes-Pyrénées, des clochettes très anciennes ont été découvertes à Saint-Pé-de-Bigorre et à Izaux (IVe siècle). Elles sont en tôle de métal découpée et assemblée, tradition conservée pour les sonnailles de troupeaux, encore fabriquées à Nay par les établissements Daban.
Les cloches connaissent un grand développement en Europe avec l’avènement du christianisme, se généralisant dans les églises entre les IVe et IXe siècles. Elles s’imposent comme un objet de culte destiné à appeler les fidèles aux offices. Grégoire de Tours affirme que l’usage des cloches est très répandu en Gaule au VIe siècle. Le concile d’Aix-la-Chapelle (817) prescrit au moins deux cloches dans chaque église.
Au fil du temps, la technique de fonte se perfectionne et l’identité sonore de la cloche évolue. Les premières traces de fonte retrouvées dans les Landes sont du XIIe-XIIIe siècles. La forme des cloches est d’abord allongée avant de s’élargir à la base à partir du XVIe siècle, époque de grande maîtrise de la fonte. Mais c’est aussi un temps de destructions du patrimoine campanaire. Dans les années 1560, les Protestants limitent l’emploi des cloches en Béarn. Certaines sont détruites et leur métal utilisé pour fabriquer des canons. Tel fut le cas des cloches de l’abbaye de Saint-Pé-de-Bigorre. À Tarbes, celles de la cathédrale fondent dans l’incendie de 1573.
Des destructions à la patrimonalisation
L’époque révolutionnaire impacte durablement les cloches : 100 000 disparaissent alors. À partir de 1791, il est décidé de récupérer leur métal pour de la monnaie puis de l’artillerie. Le 23 août 1793, un arrêté du Département des Hautes-Pyrénées ordonne la saisie des cloches, n’en conservant qu’une par église plus celle de l’horloge s’il en existe. Les autres sont envoyées à la fonderie de Pau mais certaines communes en profitent pour changer leur cloche fêlée par une neuve.
Le culte catholique est supprimé mais les cloches servent à donner l’alerte, à convoquer les habitants aux cérémonies républicaines. À partir de 1802 et le rétablissement du culte, de nouvelles cloches sont fondues avec une grande production sous le Second Empire.
La période 1850-1905 marque l’apogée de l’art campanaire qui bénéficie des nombreux réaménagements ou reconstructions d’églises, des aides de l’État, et de la révolution industrielle (fonderie, chemin de fer). Des négociants comme le tarbais Dupont proposent dès 1840 et à moindre coût, des cloches produites à l’avance.
Les conflits contemporains atteignent les cloches qui redeviennent des canons. C’est ainsi que celles de la basilique supérieure de Lourdes sont réquisitionnées en 1870. Durant la Seconde Guerre mondiale, les cloches sont menacées par l’occupant qui demande qu’on lui livre un certain tonnage de matériaux non ferreux.
À contrario, à l’issue de la Première Guerre mondiale, l’Arsenal de Tarbes peut concéder du métal à des communes pour la fonte de cloches, comme à Saint-Sever-de-Rustan.
Après le départ des Français d’Algérie en 1962, des cloches sont rapatriées en métropole. Elles vont trouver place dans des églises comme celle de La Gespe à Tarbes.
Ces menaces récurrentes mobilisent les acteurs de la conservation du Patrimoine. Dans les années 1900, des enquêtes campanaires sont lancées pour recenser et protéger les cloches les plus anciennes.
Entre les années 1910 et 1930, la Revue des Hautes-Pyrénées publie des notices de prêtres érudits sur les cloches remarquables du département et certaines sont classées Monument historique.
Depuis les années 1950, les interventions techniques comme l’électrification des sonneries impliquent une surveillance accrue.